LES SYNDROMES ALPHABETIQUES
Erick LAURENT Montpellier
DEFINITION
En 1957 Albert proposa pour qualifier les incomitances horizontales dans le regard vertical le terme de syndrome alphabétique. En raison de son caractère éminemment descriptif il fut internationalement accepté.
On parle de syndrome V si l’angle est plus convergent (ou moins divergent)de 15 dioptries en bas . On parle de syndrome A si la divergence augmente (ou si la convergence diminue)de plus de 10 dioptries dans le regard vers le bas.
HISTORIQUE
Les grands ophtalmologistes du XIX ieme siècle comme Duane et Von graefe
avaient déjà signalé ces anomalies mais l’individualisation du concept est un produit du milieu du XX ieme : Urrets-zavalia , Costenbader, Urist, Albert en sont les
promoteurs.
Monsieur et
Madame Hugonnier ont introduit le
syndrome en France dans les années
1960.
Von NOORDEN en fait «une des contributions les plus
importantes de la strabologie de ces quarante dernières années ».
Pourquoi ?
LES ENJEUX
Les syndromes alphabétiques sont
d’une extrême fréquence pour
qui les recherchent systématiquement.
Ils posent des problèmes physiopathologiques
extrêmement intéressants en relation avec ceux des strabismes cycloverticaux.
Les
étiologies proposées vont des anomalies
mécaniques aux défauts de la programmation neurogène.
On oppose ainsi les troubles anatomiques qui
sont orbitaires pour
Urrets-Zavalia (faciès mongoloïdes ou anti-mongoloïdes ), musculaires
pour Gobin (sagitalisation des obliques ) ou capsulo-aponévrotiques pour Demer
(poulies ténoniennes ) aux «dysfonctionnements» des noyaux
oculomoteurs ou des centres supranucléaires.
Les termes de ce débat ne sont pas sans
rappeler ceux qui agitèrent nos pairs à propos du strabisme lui-même au début
du siècle passé.
Sur
le plan thérapeutique s’ils peuvent
souvent être négligés il est des cas ou
leur traitement est indispensable.
SYNDROMES ALPHABETIQUES AVEC
DYSFONCTION DES OBLIQUES.
Le strabisme cyclovertical est au premier plan, le syndrome alphabétique n’est qu’un élément du tableau.
Dans
ces cas l’incomitance horizontale est le plus souvent explicable par l’action
horizontale des muscles obliques dans leur champ d’action. Ainsi on retrouve un
syndrome V dans les strabismes avec élévation en adduction par «hyperfonction » de l’oblique
inférieur(OI) ou paralysie de l’oblique supérieur (OS)et un syndrome A dans la
rare hyperfonction de l’OS ; la paralysie isolée de l’OI est hypothétique
et son hypofonction s’inscrit plutôt dans le cadre d’une paralysie des 2
élévateurs.
Le traitement est assez facile et repose sur
la chirurgie des obliques : affaiblissement ou renforcement suivant les
cas.
De
délicats problèmes physiopathologiques et thérapeutiques se posent si le
syndrome alphabétique et la dysfonction
de l’oblique sont antinomiques : syndromes A avec élévation en
adduction par exemple. On les discutera avec les syndromes alphabétiques
isolés.
Leur
physiopathologie et traitement ne sont pas l’objet d’un consensus !
Les
travaux récents de Demer ont
énergiquement relancé le débat. Nouvelle approche physiopathologique ou habit
neuf pour des travaux anatomiques anciens ? L’avenir tranchera.
Quelle
attitude pratique ?
Le
plus simple est d’ignorer l’incomitance. C’est même la règle si le strabisme
est absent en position primaire et/ou vers le bas. Toute chirurgie peut
d’ailleurs être inutile dans ces cas !
Parfois
la correction de l’angle horizontal par intervention sur les droits horizontaux
suffit à rendre l’incomitance négligeable.
Sinon
de nombreuses techniques ont été
proposées : décalage horizontal des droits verticaux,
décalage
vertical des droits horizontaux,
décalage oblique des horizontaux en reculant ou réséquant le coté du muscle ou
la déviation est la plus forte ou bien
en faisant…l’inverse !
Aucune
technique n’a fait la preuve de sa prééminence. L’évaluation randomisée de LA
bonne opération reste à faire.