Nystagmus et prise en charge médico-sociale de la malvoyance

Catherine Duncombe-Poulet,

10 rue du château d’eau, Caen 14000

1.

Elle varie selon les pays.

Selon la définition internationale de l’OMS en 1992, le malvoyant est une personne présentant une déficience visuelle même après traitement et/ou meilleure correction optique, dont l’acuité visuelle est comprise entre 0,3 et la perception de la lumière ou dont le champ visuel est inférieur à 10° autour du point de fixation mais qui utilise ou est potentiellement capable d’utiliser sa vue pour planifier et/ou exécuter une tâche.

En France la reconnaissance de la malvoyance repose non pas sur cette définition stricte basée essentiellement sur l’acuité visuelle ou un champ visuel binoculaire tubulaire mais sur l’ensemble des déficiences visuelles conséquences de la pathologie oculaire et leur retentissement sur la vie de la personne.

Une des responsabilités de l’ophtalmologiste dans la prise en charge du handicap visuel est de rédiger le certificat médical qui permettra d’évaluer la valeur fonctionnelle de l’appareil visuel.

Quelques conseils et éclaircissements sur ce certificat à la suite des références bibliographiques.

2.

La loi handicap du 11 février 2005 pour l’égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées s’est concrétisée par de nombreuses mesures dont :

Le patient déficient visuel et/ou sa famille orienté vers la MDPH fait la demande de reconnaissance de son handicap et établit un « projet de vie » destiné à le compenser et lui permettre la vie la plus autonome possible.

L’équipe pluridisciplinaire d’évaluation de la MDPH qui réunit des professionnels ayant des compétences médicales (médecin MDPH, médecin scolaire,…) ou paramédicales (psychologue notamment), des compétences dans le domaine du travail social, de la formation scolaire et universitaire, de l’emploi et de la formation professionnelle, étudie le dossier des souhaits et besoins de la personne :

les confronte aux documents médicaux (dont les certificats qui permettent d’évaluer le taux d’incapacité), paramédicaux, scolaires, devis et factures puis propose à la commission des droits et de l’autonomie CDAPH qui siège au sein des MDPH un plan personnalisé de compensation du handicap.

Le plan personnalisé de scolarisation ou PPS en est une partie essentielle chez l’élève handicapé. Il peut être décidé une orientation dans un établissement plus adapté que le milieu scolaire ordinaire (classe d’intégration scolaire ou CLIS, UPI, IME, institut pour déficient visuel,…). Ce plan est évalué chaque année par l’équipe de suivi de la scolarité ou ESS qui réunit le corps enseignant, la famille et les intervenants divers.

Le jeune déficient visuel et sa famille peuvent par ailleurs être orientés vers une prise en charge globale dans un centre médico-social ou vers des professionnels libéraux qui l’aideront à surmonter les difficultés rencontrées lors de sa croissance et de son apprentissage scolaire.

La CDAPH qui réunit des représentants de l’état (DDASS, Inspection académique, Direction départementale du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle, CAF, CPAM), des membres d’associations et des parents d’handicapés, des représentants du Conseil Général prend les décisions relatives à l’ensemble des droits de la personne handicapée.

La procédure complète en dehors des cas d’urgence nécessite 4 à 6 mois.

3.

Une prise en charge par un centre médico-social peut être notifiée par décision des commissions des MDPH avec l’accord de la famille. L’objectif est d’aider le jeune déficient visuel à se développer et à s’intégrer au mieux malgré son handicap visuel par l’apprentissage de moyens de compensation. Un soutien psychologique, une rééducation orthoptique, psychomotrice, un apprentissage des gestes de la vie quotidienne, des techniques informatiques, une aide à l’utilisation du matériel pédagogique adapté à l’école, etc.. sont souvent nécessaires à l’enfant.

Ces centres ( sauf les CAMPS ou centre d’action médico-sociale précoce pour enfant de 0 à 6 ans qui regroupent des professionnels exerçant en un lieu unique) fonctionnent comme des SESSAD (service d’accompagnement familial et d’éducation précoce). Ils regroupent des professionnels habilités à la prise en charge de la malvoyance qui interviennent sur les différents lieux de vie du jeune (domicile, centre de loisir, centre sportif, centre scolaire, etc…). Ces intervenants agissent en concertation selon les besoins de l’enfant et de l’adolescent.

Ce sont :

Le rôle de l’ophtalmologiste y est d’informer sur la déficience visuelle en général et relative à chaque jeune, d’assurer le suivi en coordination avec les autres médecins et spécialistes (la déficience visuelle peut être associée à d’autres déficiences) ainsi qu’avec l’orthoptiste du S3AIS.

Le rôle de celui (celle)-ci est d’évaluer les capacités et les limites visuelles, d’améliorer par des exercices les anomalies de discrimination et de lecture, les troubles de la motilité conjuguée et la coordination oculo-manuelle. Il (elle) évalue les besoins en aide visuelles et la taille des agrandissements nécessaires lors de la scolarité. En concertation avec l’opticien spécialisé, l’enseignant spécialisé et toute l’équipe.

Les jeunes de plus de 16 ans en apprentissage ou de plus de 20 ans peuvent bénéficier d’un service interrégional d’appui aux adultes déficients visuels (SIADV) dont l’objectif essentiel est l’insertion professionnelle.

En conclusion, la prise en charge de la malvoyance est pluridisciplinaire et intriquée. Elle évolue avec la personne, de la petite enfance à l’âge adulte, et avec la déficience visuelle. La loi handicap est elle-même sujette à évolution.

Les rôles de chacun sont définis. Une spécialisation est nécessaire aux éducateurs, rééducateurs dont les orthoptistes, opticiens, psychologues, enseignants... Cependant les grandes lignes de la prise en charge sont à connaître de tous.

Quelques références bibliographiques utiles pour rechercher des informations sur la prise en charge actuelle du handicap en général et des handicapés visuels en particulier.

Sur le handicap visuel

Handicapés visuels

Revue de l’Ophtalmologie française

Vademecum de l’ophtalmologiste

Dans ce numéro spécial annuel à la disposition de tous les ophtalmologistes adhérents du SNOF, 40 pages riches de renseignements.

A consulter également au chapitre « expertises », le guide barème pour l’évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées (décret du 21 octobre 2004).

Le site : http://www.bassevision.net/

dont le webmaster est le Docteur Xavier Zanlongui.

Handicap visuel de l’enfant et de l’adolescent

Mission Handicaps

Les guides de l’AP-HP

2008, 92 p .

Ce guide aborde de très nombreux aspects. Fruit des réflexions et du travail d'équipes et d'auteurs multidisciplinaires, il s'adresse à un très large public, allant des professionnels de la santé aux patients ou leur famille, en passant par les travailleurs sociaux. Les sujets traités portent sur l'annonce du handicap visuel, sa prise en charge et sa rééducation au long cours, le rôle de l’orthoptiste, la législation qui l'entoure, la scolarisation et l'intégration de l'enfant ou de l'adolescent malvoyant. Il est complété par un annuaire où l'utilisateur trouvera des adresses de services d'ophtalmologie pédiatrique, d’établissements de soutien et de scolarisation (essentiellement à Paris et en périphérie) ainsi que celles d’associations de patients déficients visuels.

Il est possible de télécharger ce guide.

Sur la scolarisation

Guide pour la scolarisation des enfants et adolescents handicapés

Il intègre les directives et les dispositions réglementaires liées à l'application de la loi du 11 février 2005 qui considère que tout enfant est de droit un élève. Le nombre d'enfants handicapés scolarisés est passé de 89 000 en 2002-2003 à plus de 155 000 en 2006-2007.

Il est possible de le télécharger sur le site http://www.education.gouv.fr

En navigant sur les sites des inspections académiques on obtient les renseignements sur l’orientation et la scolarisation des élèves en situation de handicap de son département : plan personnalisé de scolarisation, équipe de suivi de scolarisation, référents de l’éducation nationale, etc…

Exemple : Adaptation Scolaire et Scolarisation des Elèves Handicapés dans le Calvados

Sur ce site tous les sigles mystérieux : SEGPA, CLIS, PPI, RASED, etc… et tout devient plus clair…

Sur la loi handicap

La loi du 11 février 2005 Le site www.handicap.gouv.fr propose un suivi de l'application de la loi du 11 février 2005, toutes les aides et prestations, la liste des maisons départementales des personnes handicapées, un zoom sur l'emploi, des adresses utiles, le fonctionnement des MDPH : équipe pluridisciplinaire, CDAPH,

CNSA Caisse Nationale de Solidarité et d'Autonomie - Retour à la page d'accueil http://www.cnsa.fr/

Créée en 2004, la CNSA est à la fois une caisse (elle est alimentée en particulier par les prélèvements sociaux), une agence et un espace public d’échanges pour l’autonomie des personnes âgées et des personnes handicapées.

Sur le site des pages didactiques concernant la CNSA elle même mais également des fiches concernant les maisons du handicap MDPH, la prestation de compensation du handicap PCH, l’allocation pour l’autonomie des personnes âgées APA, etc…

Les formulaires CERFA pour toute demande MDPH peuvent y être téléchargées (onglet « documentation ») : projet de vie, certificat médical, demande d’AEEH (avec ou sans complément), demande d’AAH (avec ou sans complément de ressource)..

Sur le travail

Ministère du Travail, des Relations sociales, de la Famille et de la Solidarité http://www.travail-solidarite.gouv.fr/ onglet handicap

on peut également trouver sur le site la présentation du plan handicap visuel de juin 2008 qui fait suite aux propositions du rapport Gilbert Montagne de janvier 2008 .

Par des associations

Rédaction du certificat médical pour le dossier de demande ou de renouvellement de prise en charge du handicap visuel (modèle en annexe)

Quelques points importants

Il n’est pas lu par des professionnels de la vision : les termes employés doivent être simples.

Il nécessite un examen récent et complet des différentes fonctions visuelles.

Il est destiné au chiffrage du taux d’incapacité du patient selon des grilles réglementaires dont les normes sont à appliquer lors de l’examen.

Le chiffrage de l’acuité visuelle:

Le champ visuel est la deuxième fonction visuelle essentielle à préciser :

Les autres éléments déficitaires de la fonction visuelle (vision des couleurs, vision des contrastes, vision stéréoscopique, vision nocturne, réaction à la lumière et accommodation, oculo-motricité …) ne doivent pas être oubliés dans le certificat car ils permettent parfois de passer à un taux d’incapacité supérieur. Allocation et carte d’invalidité peuvent en dépendre.

L’aspect esthétique du regard (microphtalmie, ptôsis, etc…) et la pénibilité des traitements éventuels sont signalés également.

Le retentissement de la déficience visuelle sur la vie du patient est à mentionner : vie quotidienne, scolarité, emploi, loisirs et vie socioculturelle.

La mention isolée du diagnostic de l’affection à l’origine de la déficience visuelle n’est pas suffisante. Elle oriente cependant vers un pronostic évolutif.

Le chiffrage de l’incapacité

L’incapacité est l’aspect fonctionnel du handicap (la déficience étant l’aspect lésionnel). C’est la réduction partielle ou totale de la capacité d’accomplir une tâche considérée comme normale. Elle s’apprécie avant tout appareillage ou aide technique. Elle est chiffrable : on parle de taux d’incapacité permanente partielle ou IPP.

Ce taux est déterminé par l’équipe pluridisciplinaire de la MDPH (Maison Départementale des Personnes Handicapées) selon des grilles réglementaires (cf annexes). Les certificats médicaux sont un élément clé de leur réflexion.

Les différents taux obtenus ne s’additionnent cependant pas ; une règle de calcul comme dans toute expertise est appliquée.

Depuis novembre 2007 on ne fixe plus de taux précis mais des fourchettes de taux d’incapacité allant de la forme légère (taux de 1 à 15%) à la forme sévère (taux de 80% et plus)

Deux taux restent importants :

50% qui ouvre les droits sociaux :

80% donne droit aux allocations et à la carte d’invalidité ; la mention « cécité » est apposée si l’acuité visuelle est inférieure à 1/20.

La mention « besoin d’accompagnement » peut être apposée en fonction du bilan visuel et de l’âge du patient.

Guides-barème et grille d’Esterman sont disponibles dans le

« Vademecum de l’ophtalmologie », édition du SNOF et également en annexe.

En conclusion, le certificat médical est un élément clé du dossier de prise en charge sociale du handicap.

Les équipes pluridisciplinaires des MDPH peuvent être déroutées par des certificats médicaux incomplets ou variables d’un praticien à l’autre, notamment en ce qui concerne le chiffrage de l’acuité visuelle.

Il nous incombe d’être le plus précis possible.

Guide-barème de 1993 pour le taux médical d’incapacité fonction de la diminution de l’acuité visuelle de loin en monoculaire (échelle de Monoyer à 5 mètres)

Guide-barème pour le taux médical d’incapacité fonction de la diminution de l’acuité visuelle de près en monoculaire (échelle de Parinaud à 40 cm)

Champ visuel binoculaire cible III/4

Chaque point manquant donne 1% d’IPP